"La matinée avait commencé très calmement.
Vers les 11 heures, toutefois, nous avons entendu les premiers coups de
feu. Le quartier se vidait alors tout doucement. Vers midi, mon ami Jeannot,
le pâtissier (Jean-Paul Reuliaud), deux autres commerçants
et moi-même allâmes déjeuner dans un petit restaurant
du boulevard Marceau.
Vers 13 heures, la fusillade s'entendait très bien. A 13 heures
30, des A.T.O., revolver au poing, nous demandent de vider les lieux.
Certains partirent vers la rue de Mostaganem, d'autres dont nous-mêmes,
vers la gare.
Au carrefour, avec la rue Marquis-de-Morès, un "soldat"
de l'A.L.N. braquait un copain "José".
A l'angle du boulevard Marceau et de la rue d'Assas, se trouvait par hasard
un lieutenant de l'armée française, soutenu à quelques
mètres derrière par un sergent. Leur compagnie (un régiment
d'infanterie de marine dont j'ai oublié le numéro) se trouvait
dans la gare. J'appelais le lieutenant qui descendit le Boulevard Marceau
pour délivrer José, ce qui fut fait rapidement.
Je me réfugiais alors avec d'autres personnes à l' intérieur
de la gare où se trouvaient déjà de nombreux civils.
A partir de ce moment, jusque vers 17 heures, le R.I.M.A. devait en découdre
avec l'A.L.N. qui laissait quatre morts dans l'Ecole Lamoricière,
en face.
A 18 heures, le calme régnait dans le quartier et nous avons vu
alors passer des G.M.C. conduits par des soldats français remplis
de blessés soignés qui revenaient de l'hôpital.
Le lendemain matin, le commissariat du 5° arrondissement était
coiffé par un groupe de gendarmes mobiles (les rouges).
J'ai pu assister, alors, à une violente altercation : un lieutenant
d'lnfanterie insultait un capitaine de gendarmerie qui ne savait plus
que répondre pour se défendre.
Et le 7 juillet, la compagnie du R.I.M.A., pour sa brillante conduite,
était rapatriée d'urgence en France.
Merci, quand même à ce lieutenant sans qui beaucoup d'amis
du quartier (et moi-même) serions restés pour toujours à
Oran...
Gérard VINCENT
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