Complément à l'étude 50/40 (50/40bis)
Le docteur Jean-Claude PEREZ " Le sang d'Algérie " aux Editions Dualpha - BP 58, 77522 COULOMMIERS CEDEX
Précision rendue nécessaire à la suite d'un message
un peu trop incisif
à propos de l'affaire Si Salah On a voulu mettre en doute la date de l'arrestation du commandant Si Azzedine, qui a joué un rôle fondamental dans la mise en route de l'affaire Si Salah. J'apporte la précision suivante : c'est le 27 mai 1957 que l'affaire Si Azzedine a été conclue. L'opération militaire avait débuté le 22 mai dans la soirée, dans un secteur de 100 km², au milieu duquel s'élève le douar d'Agounennda. Ce gros village placé à proximité de l'oued Boulbane et de ses affluents, se situe dans une zone de passage où les routes allant de Sakamody à la forêt des Béni-Miscera croisent celles qui rejoignent oued-Malah à Blida. Bigeard avait installé son PC sur la côte 1298, le PC " Bruno ". A 17 heures, le 22 mai 1957, le départ est donné. Un rassemblement des effectifs est effectué à Médéa. Les paras s'équipent contre le froid de la nuit et à 20 heures, ils repartent en direction de Champlain. La destination est atteinte à 23 H 30. Celui qui fait face c'est Azzedine avec son commando. Les hélicoptères sont appelés en renfort, et finalement, 700 parachutistes encerclent 300 fellaghas environ. Ceux-ci se défendent âprement. Des combats au corps à corps s'engagent pendant 48 H. Quand les " paras " iront au résultat, ils dénombreront
96 rebelles tués et 12 prisonniers. Les forces de l'ordre ont eu
à déplorer la mort de 8 paras et 29 blessés, la plupart
très légèrement. Donc Si Azzedine a bien été fait prisonnier en mai 1957 et c'est à partir de cette époque qu'il va jouer un rôle inattendu. Depuis 1956 en effet, le général De Gaulle, en vacance du pouvoir, complote rue de Solferino dans le VIIème arrondissement de Paris, dans les locaux de l'ancien RPF . Un comité de travail a été constitué dirigé par Olivier Guichard. Par l'intermédiaire de ce comité, De Gaulle entretient des contacts avec l'organisation extérieure de la rébellion algérienne, par l'intermédiaire de Me Boumendjel, dont le frère est tué durant la même année, à Alger, lors d'un interrogatoire par les services spéciaux. C'est à cette époque que De Gaulle déclare à Boumendjel : " il est bien évident que l'Algérie sera indépendante ". Cette conjuration entre De Gaulle et l'organisation extérieure
de la rébellion Algérienne, n'a pu se faire que depuis le
ralliement de Ferhat Abbas à l'organisation extérieure de
la rébellion algérienne en 1956. Ferhat Abbas était
en relation permanente avec le général De Gaulle depuis
1943, c'est-à-dire depuis l'arrivée du général
à Alger. Celui-ci avait soutenu Ferhat Abbas dans la constitution
de l'AML (l'Association du Manifeste de la Liberté), qui regroupait
4 formations politiques : De Gaulle connaît donc bien Ferhat Abbas et il va se développer entre les deux hommes, une véritable conjuration. Si on veut bien revenir à l'affaire Si Azzedine, tout se passe comme si celui-ci avait été capturé à point nommé pour devenir un élément de liaison fondamental entre le corps d'armée d'Alger, et Ferhat Abbas. Le colonel Godard m'a déclaré un jour, que Si Azzedine avait été l'objet d'une tentative de prise en mains de la part du général Massu, pour intoxiquer Ferhat Abbas. Compte tenu de l'évolution des évènements, on se rend compte que cette hypothèse ne correspond à rien de sérieux. De toute évidence en effet, les contacts éventuels entre le pouvoir, par l'intermédiaire du corps d'armée d'Alger et Ferhat Abbas, n'avaient qu'un but : conférer à Ferhat Abbas les moyens de s'installer en Algérie. C'est ainsi que fut créé le 10 septembre 1958, le GPRA (Gouvernement Provisoire de la République Algérienne). Cette naissance fut célébrée en grande pompe au Caire, en présence de Farès et de l'écrivain Amerouch, représentant très officieux et clandestin du général De Gaulle. Cette conjuration De Gaulle/Ferhat Abbas s'inscrit dans un plan opérationnel que l'on néglige d'évoquer aujourd'hui encore. Il s'agit du " plan Pompidou " qui dès le mois de juin 1958, nourrissait l'ambition d'organiser une rencontre entre la France et des émissaires de l'organisation extérieure algérienne, pour aboutir à un cessez-le-feu. Tout se passe comme si un état major pompidolien, rassemblant des sommités du capitalisme financier, avait décidé de mettre un terme à la guerre d'Algérie au plus tôt. En abandonnant l'Algérie à la rébellion. De Gaulle apparaît, au-delà de tous ses comportements politiques, comme un exécuteur des hautes uvres du capitalisme financier international qui voulait opérer le délestage économique du débouché algérien. L'Algérie les intéressait par le pétrole qu'elle était capable de produire, ainsi que le gaz. Mais de là à subvenir aux besoins des Algériens de confession musulmane et au point de sauver la vie des Français d'Algérie, il y avait un gigantesque " no mans land " idéologique que les capitalistes n'étaient pas décidé à franchir. Avec De Gaulle comme leader opérationnel, ils nourriront des contacts complices, des contacts opérationnels avec le parti communiste français et algérien pour aboutir à la " libération de l'Algérie ". Si Azzedine est apparu à un moment donné, comme un agent de liaison, plutôt comme un officier de liaison entre le GPRA et le gouvernement français par l'intermédiaire du corps d'armée d'Alger. Je sais qu'en affirmant cela, je soulève parfois la colère
d'hommes de grande valeur qui ont été sous les ordres de
Massu. Il est allé jusqu'au bout de sa fidélité lorsque deux de mes camarades, Serge Jourdes et un de nos amis, qui ne supporte pas mes critiques contre Massu, sont allés lui rendre visite pour lui demander de s'incorporer à l'opération salvatrice qui s'annonçait pour le bénéfice de l'Algérie française. Il ne les dénoncera pas. Mais il laissa l'Algérie française mourir. Alors que, lui, avait les moyens de la sauver s'il avait décidé de le faire. Je comprends l'amertume des anciens fidèles de Massu et en particulier de mon ancien frère d'armes qui met en doute le bien fondé de mes informations. Je le respecte et je lui conserve mon amitié. Je lui dis très amicalement qu'au lieu de me livrer un commentaire
(qui n'était par forcément agréable), et compte tenu
de ses compétences littéraires, il aurait dû plutôt
corriger une faute de langue que j'ai commise dans la rédaction
de cette étude 50/40 quand j'ai écrit que " les silences
battaient leur plein " alors que tout le monde sait qu'il fallait
écrire " les silences battaient son plein ".
Nice, le 3 décembre 2010 |